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Expert près la Cour d’Appel et les Tribunaux
Assesseur de la Commission de Conciliation et d’expertise douanière


En 2004 une équipe de maçons entreprend la rénovation d’une vieille demeure qui s’élève dans le bourg nommé BAZAS situé à une soixantaine de kilomètres de Bordeaux.

Bazas, cité gasconne prospère au sud des vignobles bordelais de Sauternes et de Graves et au nord de l’immense forêt landaise. Bazas conjugue un dynamisme économique avec un riche patrimoine culturel et historique : économique par l’élevage du bœuf de race bazadaise, l’industrie du bois, la production de vin et historique en tant que siège épiscopal, administratif et judiciaire.
Située sur une grande voie de passage, Bazas reste une ville étape. Ses pavés ont été foulés par Richard Cœur de Lion, Henri III d’Angleterre, François Ier, Charles Quint, Charles IX, Louis XIV...Les diligences ont sillonné la route des petites Landes, tronçon du chemin de Saint Jacques de Compostelle parti de Vézelay, devenue la route impériale et un axe primordial liant le nord au sud.
Bazas n’a cessé d’exercer tout au long de son histoire les fonctions de ville commercialement active comme en témoignent ses pittoresques marchés. Charles VIII rétablit à Bazas les marchés hebdomadaires le samedi et les foires bisannuelles.

Le lieu de la trouvaille se situe dans un mur de pierre au premier étage d’une imposante maison largement remaniée au cours des siècles dont la façade semble appartenir au XVIIe siècle.
Souhaitant restructurer l’ensemble du bâtiment, le maître d’œuvre décide d’abattre quelques murs. Un coup de pioche dans une paroi fait apparaître une sorte de cavité formant une cachette. De cette niche aménagée pour recevoir ce dépôt monétaire, deux pots sont exhumés : l’un en terre vernissée verte et l’autre en terre cuite grisâtre (n°311). Le premier vase contient 157 monnaies d’or et l’autre contient le monnayage d’argent. En grattant les gravas, des petites pièces de billon appelées « pièces noires » et éparpillées en vrac autour des deux pots sont mises au jour. En tout, très exactement 1010 monnaies sont révélées.

Dans l’histoire de Bazas, l’époque qui nous préoccupe se situe entre 1360 date de l’émission du « franc à cheval » de Jean II le Bon, la plus ancienne monnaie du trésor et 1483, année de l’avènement de Charles VIII et date de la monnaie la plus récente et la plus proche de la date de l’enfouissement.
Cette période concerne les rois de France Jean II le Bon, Charles V le Sage, Charles VI le Fou, Charles VII, Louis XI et Charles VIII.
Les origines européennes des monnaies composant le Trésor de Bazas sont l’Aquitaine, le Béarn, la Bretagne et la Grande Bretagne, la Provence et le Dauphiné, l’Italie, l’Espagne et le Portugal.
La période concernée et les origines des monnaies nous indiquent les circuits commerciaux, les voies d’échanges, les voyages, la durée de circulation.

Le propriétaire de cette demeure qui a caché son « magot » pour le soustraire à la convoitise des voleurs est probablement mort par accident, de maladie ou assassiné avant d’avoir pu le récupérer ou d’avoir informé un parent ou un ami de l’endroit où il se trouvait. Il s’agissait vraisemblablement d’un notable faisant le commerce d’une denrée fort appréciée en Europe tel que le vin, ou d’un grand voyageur ou encore d’un ecclésiastique. Le mystère reste entier.

Le trésor a donc été remis dans son intégralité à Michel Amandry, Directeur du département des Monnaies, Médailles et Antiques de la Bibliothèque Nationale de France. L’inventaire détaillé a été assuré par Michel Dhénin, Conservateur général du département des Monnaies, Médailles et Antiques de la Bibliothèque Nationale de France et Dominique Gerin, Conservatrice en chef de ce même cabinet a été chargée de la photographie. Nous souhaitons leur exprimer nos vifs et sincères remerciements pour nous avoir permis de travailler en étroite collaboration dans la réalisation de ce travail minutieux. Par ailleurs et ultérieurement à sa dispersion, ce trésor fera l’objet d’une publication scientifique extrêmement détaillée par leurs soins.
L’étude scientifique scrupuleuse de l’intégralité d’un trésor est capitale. Elle renseigne sur le propriétaire qui vivait dans cette maison, sur ses habitudes mais aussi sur la circulation monétaire à une époque précise. Elle permet de comprendre la vie économique de nos ancêtres. L’étude d’un trésor c’est aussi un des passe-temps les plus riches et les plus excitants pour l’esprit et l’imagination.
Ce n’est que du métal mais il est animé d’une vie secrète.
L’étude approfondie nous en dira davantage. Mais après une première analyse des monnaies qui composent cette découverte, on dénombre :

Pour le royaume de France : 84 monnaies d’or et 13 monnaies d’argent et billon
Pour le duché d’Aquitaine : 4 monnaies en or et 473 monnaies d’argent et billon
Pour la péninsule ibérique : 11 monnaies d’or et 121 monnaies d’argent
Pour le Dauphiné : pas d’or et 83 monnaies de billon
Pour l’Italie (Naples, Bologne, Milan, Venise) : 4 pièces d’or et 80 d’argent
Pour les Pays Bas (Flandre, Brabant, Hainaut, Utrecht) : 33 monnaies d’or et 3 d’argent
Le Béarn est représenté par 1 monnaie d’or et 33 monnaies d’argent
Le duché de Bretagne par 30 pièces d’argent
Pour l’Angleterre on a 19 monnaies d’or et 3 monnaies d’argent
Pour la Provence : 10 monnaies d’argent
Le Comté d’Évreux : 4 monnaies d’argent
La Bourgogne 1 seule monnaie d’or


Toutes les monnaies d’or ainsi que les monnaies d’argent, les plus rares ou les plus belles sont vendues individuellement. Les monnaies d’argent et de billon plus courantes sont regroupées en lots par royaume, Duché, Comté.... - toutes les monnaies photographiées sont reproduites en grandeur réelle et en couleurs.
Précisons que ces monnaies sont restées « dans leur jus ». Elles n’ont absolument pas été nettoyées - certaines sont légèrement cabossées et peuvent être redressées aisément. Les plus anciennes ne sont pas d’une grande fraîcheur par contre les exemplaires frappés vers la fin du XVe sont en meilleur état de conservation.
Les deux pots ayant contenu le trésor sont décrits sous le numéro 311 et sont vendus en fin de vacation.

La première monnaie de cette vacation mais la plus ancienne monnaie de ce trésor appartient au système monétaire français. Il s’agit de la première appellation du Franc d’or représentant le roi Jean II le Bon à cheval. Elle fut frappée en 1360 pour payer la rançon du roi prisonnier en Angleterre.
Parmi les 83 monnaies royales en or qui suivent, on remarquera l’abondance des monnaies de Charles VII soit 14 « Royal d’or », 29 écus dit écus vieux, 1 écu ancien et deux demi-écus et aussi 18 écus d’or de Louis XI mais un seul écu de Charles VIII. Il semblerait que le notable soit mort au début de règne de ce monarque.

À côté des rois, un certain nombre de seigneurs, ducs, comtes ont fait battre monnaie. Ce droit de battre monnaie n’appartenait pas à tous les seigneurs, il résultait de la coutume. L’ordonnance de 1315 établit les conditions de poids et de titre. Chacune des monnaies féodales devait être frappée dans le respect de la tradition. Il était interdit de s’écarter des règles.
Ce fut l’origine des monnaies féodales largement illustrées ici par les nombreuses émissions d’Aquitaine, celles du Béarn avec Gaston de Foix et Catherine, de Bretagne, du duché de Bourgogne, du comté de Provence, celle du comte d’Évreux et roi de Navarre, Charles le Mauvais... Institué par voie de délégation, ce monnayage se justifie à une époque où les barons détenaient une part de la souveraineté. Mais la véritable raison d’existence de ces monnaies est d’alimenter le commerce des foires locales comme en témoigne la composition de ce trésor.

Parmi le monnayage des pays voisins : Angleterre, Espagne, Portugal, Italie, on notera quelques raretés dont certaines connues à quelques exemplaires seulement et plus particulièrement deux monnaies présentant un grand intérêt historique et numismatique.
Ces deux émissions sont dues au roi de Castille et Léon, Enrique IV (1454-1474) :
un « enrique » d’or de l’atelier de Ségovie qui semble n’avoir jamais été édité. Le roi est représenté assis sur un trône bas alors qu’habituellement il est assis sur un trône gothique à pinacles.
le rarissime « castellano » de ce même monarque sortant de l’atelier de Cuenca dont un autre exemplaire a été révélé par la trouvaille de Murcia en 1993.

Nous vous invitons à venir participer à ANGOULÊME à la dispersion du TRÉSOR DE BAZAS et à assister activement à cette rare manifestation d’un grand intérêt artistique et historique. L’acquisition d’une monnaie ou d’un ensemble de monnaies provenant de ce trésor doit être chargée d’une grande émotion. Ces documents permettent de mieux comprendre la réelle influence du commerce, des guerres, des conquêtes des différents territoires européens.
Certes, « les monnaies sont plates... pour qu’on puisse les entasser ». Cette boutade reviendrait à Balzac, auteur d’Eugénie Grandet dont l’existence a été perturbée par des ennuis d’argent...Mais les numismates y découvrent leurs secrets et tirent d’une active contemplation des signes, symboles et portraits, une véritable connaissance de l’Histoire.
Et à La Bruyère de dire en parlant des espèces sonnantes et trébuchantes : elles sont
« Les preuves parlantes de certains faits, des monuments fixes et indubitables de l’ancienne histoire ».